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Le bûcher - Gyorgi Dragoman - Gallimard, 2018.


C'est un livre à l'image des peuples de l'Europe de l'Est. du moins à l'idée que je m'en fais car leur culture m'est étrangère. Aux antipodes des épanchements larmoyants de la littérature francophone, la distance et la pudeur dans l'expression des sentiments font de ce roman une expérience de lecture étrange. Je n'en mesure probablement pas toute la portée littéraire. Par contre, je suis certaine d'une chose ... ce livre m'a touchée. C'est beau, c'est émouvant. C'est l'histoire d'une grand-mère et de sa petite-fille Emma qui s'apprivoisent, la première n'ayant appris l'existence de la seconde qu'après la récente mort tragique des parents. Et dans la Roumanie post Ceausescu, cette adolescente doit apprendre à se reconstruire dans un environnement qu'elle ne connaît pas. Elle doit se faire une place parmi les pestes de sa nouvelle école, passer le cap des premiers amours et faire face à la hargne incompréhensible des habitants du village envers son grand-père décédé et sa grand-mère un peu sorcière. C'est un livre où il ne se passe rien de fracassant avant les 50 dernières pages. On a l'impression que ce sont des tranches de vie juxtaposées. Les gestes ancestraux se transmettent à nouveau à travers la tarte aux prunes et les beignets au paprika. Les anicroches quotidiennes sont l'occasion de parler des blessures, des joies et des peines, de tous ces moments qu'une famille est censée partager quand les liens ne sont pas rompus. L'écriture est sans fioriture, factuelle. Moi j'ai choisi d'y voir l'expression d'une mentalité , d'une culture, d'une manière d'exprimer les sentiments complètement différente de la nôtre. Il y a dans le style de l'auteur (et de la traductrice) la retenue d'un peuple pour qui trop parler était synonyme de danger. Sans doute, nous qui vivons dans un pays où la parole est libre, ne mesurons pas à quel point ce roman doit faire écho aux personnes qui ont vécu sous une dictature, à la merci permanente de la police secrète. Ce livre m'a permis d'approcher ce que fut l'après-dictature de Ceausescu. Et ce n'est ni plus facile ni plus propre que ce que fut l'après-guerre chez nous. Les rancoeurs, les questions restées sans réponse, la difficile acquisition de la liberté sont malheureusement internationales. L'auteur m'a emmenée au coeur de son peuple, là où les blessures de l'histoire saignent toujours avec l'espoir d'un avenir meilleur dans une société plus égalitaire. Si vous arrivez à dépasser le dénuement apparent de l'écriture, si vous vous laissez porter par l'histoire lovée entre rêve, imagination et réalité, alors vous apprécierez. Pour ma part, la dernière page refermée, je sais que je viens de terminer un livre particulier, situé hors de ma zone de confort littéraire, mais je sais aussi que je viens de refermer un grand livre.

Quatrième de couverture

La Roumanie vient tout juste de se libérer de son dictateur. Les portraits du camarade général ont été brûlés dans la cour de l'internat où Emma, treize ans, arrivée après la mort tragique de ses parents, cherche encore à s'orienter. Quand une inconnue se présente comme étant sa grand-mère, elle n'a d'autre choix que de la suivre dans sa ville natale. Cette femme étrange partage sa maison avec l'esprit de son mari défunt et pratique la sorcellerie. Mais Emma comprend vite qu'il y a d'autres raisons à l'accueil malveillant que lui réservent les habitants de la ville. Peu à peu, elle découvre les secrets de sa famille. Profondément traumatisée et compromise par l'histoire qu'a traversée son pays, sa grand-mère a utilisé les pouvoirs de la magie pour surmonter des décennies dominées par la peur, la manipulation et la terreur. Et c'est cette force-là qu'Emma tente à son tour de libérer en elle pour trouver sa place dans un monde de nouveau bouleversé.

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